Troisième scission du territoire

Il faut remonter à l’année 1888 pour voir se développer une situation plus ou moins semblable à celle que nous vivons aujourd’hui en Haiti: la perte du contrôle de la partie septentrionale par le gouvernement central de Port-au-Prince(1). Le 5 Août de cette année, une révolte prenant d’abord l’allure d’une protestation contre le gouvernement de Lysius Salomon (1879-1888) éclata au Cap-Haitien. Elle se transforma vite en une insurrection quand le général Séîde Thélémaque y prit le contrôle, se dirigea avec ses troupes vers Port-au-Prince et força le président en exercice à démissionner et à prendre le chemin de l’exil.

Le gouvernement provisoire qui se forma par la suite, organisa tout de suite des élections auxquelles se portèrent candidats le chef des insurgés lui-même et un ancien fonctionnaire, François Légitime. Leurs partisans qui n’avaient, par ailleurs, aucune notion des règles du jeu démocratique, ne réculaient devant rien, utilisant même la violence, pour parvenir à leur fin.

Dans la nuit du 28 Septembre 1888, une échauffourée éclata entre les groupes rivaux près du palais national et le général Séïde Thélémaque y laissa sa peau (2). Les populations du Nord, de l’Artibonite, et du Nord-Ouest décidèrent alors de former leur propre gouvernement sous le nom de « République Septentrionale d’Haiti » tandis que les communes de Port-au-Prince et du Sud votèrent une nouvelle constitution et élurent François Légitime chef du pouvoir exécutif d’abord et président d’Haiti ensuite. La scission dura neuf mois.

Le pays ne s’en remit pas tout à fait de cette troisième scission. Des foyers de rebellions continuèrent à se multiplier à travers le pays, et bien souvent la présidence fut accordée par l’Assemblée législative au chef rebelle le plus hardi ou menaçant. Une situation qui dura jusqu’à l’occupation américaine (1915-1934).

  1. Un mouvement conduit par l’ancien militaire et ancien commissaire de police Guy Philippe s’empara des grandes villes du Nord et de L’Artibonite. dans le but de renverser le président Jean-Bertrand Aristide. Le gouvernement perdit alors tout contrôle de la partie septentrionale.
  2. Voir: Dates historiques. 28 2eptembre 1888.